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Epoque des premiers Pères Apostoliques

 

(Ier et IIème siècles)

L' Eglise a passé ses premières années de vie au sein de l'Empire romain qui a unifié politiquement le bassin méditerranéen. Cet Empire atteint le sommet de sa puissance au IIème s. avec la dynastie des Antonins: Trajan (98-117), Hadrien (117-138), Antonin (138-161), Marc- Aurèle (161-180). Fait capital à noter: l'implantation romaine fut militaire et administrative, mais non pas culturelle ou religieuse; elle a respecté très largement les diversités orientales, si bien que cet immense Empire est très cosmopolite, très diversifié. L'impact de l'Orient est notable: expansion de la langue grecque dans tout ce pays méditerranéen, et prolifération des cultes rendus à des divinités orientales: divinités syriennes, comme le dieu Soleil, égyptiennes (Isis), phrygiennes (Cybèle), iraniennes (Mithra), qui tendent à se substituer aux dieux traditionnels gréco-romains ou à s'amalgamer à eux.

Ce syncrétisme est un phénomène typique de l'époque. D' Orient est aussi 4 importé le culte de l'empereur divinisé (influence de la mythologie grecque). Devant cette explosion polythéiste, la philosophie, quoique réticente d'instinct, est elle-même saisie d'insatisfaction et de quête religieuse: le Pythagorisme prend couleur de culte religieux et de quête mystique. Le platonisme et le stoïcisme sont eux-mêmes traversés par une inquiétude religieuse, à l'instar du néo- pythagorisme.


En résumé, retenons que le christianisme à ses tous débuts, s'est propagé dans un univers marqué par l'organisation et le droit romains, l'esprit réflexif grec, et la religiosité orientale. Il devra, poussé par l'Esprit de Jésus, tracer son chemin, sans céder aux tentations du repli sectaire ou du syncrétisme ambiant. En dehors des écrits du N.T. dont le corpus (l'ensemble des livres qui le composent) est réalisé à la fin du Ier s., une littérature chrétienne apparaît contemporainement. Ces premiers documents (Didachè, Lettre de Clément de Rome aux Corinthiens) font passer, sans rupture, des Lettres Apostoliques à la littérature patristique.

Les 50 premières années du IIème s. est appelée traditionnellement, la "période des Pères Apostoliques": apostoliques, parce que proches encore du temps des Apôtres. S. Irénée dira de S. Clément de Rome (+96): "Il avait vu les Apôtres..., leur prédication résonnait encore à ses oreilles". Le même Irénée affirme encore que Polycarpe, l'évêque de Smyrne, avait été catéchisé par l'Apôtre Jean. Importance donc de ce témoignage de l'Eglise post-apostolique qui nous fait entrevoir comment s'est opéré l'articulation entre le christianisme, tel que nous le vivons encore aujourd'hui, et le message fondateur. La diversité des Eglises du IIème s., dispersées à travers tout le bassin méditerranéen, n'entrave pas la fidélité d'adhésion au message de la foi reçue des Apôtres; elle la constitue plutôt. Ecoutons ce que nous rapporte Irénée de Lyon esquissant la physionomie de l' Eglise au IIème.  

L'Eglise, bien que dispersée dans le monde entier jusqu'aux extrémités de la terre, ayant reçu des Apôtres et de leurs disciples le foi en un seul Dieu, Père tout-puissant, qui a fait le ciel et la terre et la mer et tout ce qu'ils contiennent, et en un seul Christ Jésus, le Fils de Dieu, qui s'est incarné pour notre salut, et en l'Esprit Saint, qui a proclamé par les prophètes les 'économies' (évènements du salut), la venue, la naissance du sein de la Vierge, la Passion, la Résurrection d'entre les morts et l'enlèvement corporel dans les cieux du bien-aimé Christ Jésus notre Seigneur et sa Parousie du haut des cieux dans la gloire du Père, pour récapituler toutes choses et ressusciter toute chair de tout le genre humain… Ayant donc reçu cette prédication et cette foi, ainsi que nous venons de le dire, l'Eglise, bien que dispersée dans le monde entier, les garde avec soin, comme n'habitant qu'une seule maison; elle y croit d'une manière identique, comme n'ayant qu'une seule âme 
D'un même coeur, et elle les prêche, les enseigne et les transmet d'une voix unanime, comme ne possédant qu'une seule bouche. Car si les langues diffèrent à travers le monde, le contenu de la Tradition est un et identique. Et ni les Eglises établies en Germanie n'ont d'autre foi ou d'autre Tradition, ni celles qui sont chez les Ibères, ni celles qui sont chez les Celtes, ni celles de l'Orient, de l'Egypte, de la Libye, ni celles qui sont établies au centre du monde; mais, de même que le soleil, cette créature de Dieu, est un et identique dans le monde entier, de même cette lumière qu'est la prédication de la vérité brille partout et illumine tous les hommes qui veulent parvenir à la connaissance de la vérité" (Contre les Hérésies, I, 10, 1-2). 


Une grande diversité linguistique caractérise donc l'Eglise ancienne: son expression grecque est la plus répandue; mais en Palestine, Syrie et Mésopotamie, le christianisme connaît une expression araméenne ou syriaque. Et le christianisme latin est en pleine gestation en Afrique du Nord, tandis qu'à Rome, le grec reste dominant jusqu'au IIIème s.- et même jusqu'au IVème s. pour la Liturgie: le passage du grec au latin se fera sous le Pontificat du Pape Damase (fin IVème s.). Cette Eglise du IIème s. est aussi culturellement diversifiée: en Palestine, plusieurs communautés sont encore attachées aux usages juifs et aux modes de pensée rabbiniques, tandis que d'autres s'hellénisent (à Alexandrie, par exemple); d'autres encore s'insèrent profondément dans le milieu culturel gréco-romain. Nos documents écrits des Pères Apostoliques reflètent cette diversité: Clément , à la fin du Ier s., évêque de Rome, se montre à l'aise dans la culture gréco- romaine; il exhorte à l'unité l'Eglise de Corinthe menacée par le schisme en usant d'arguments relevant de la volonté du Christ et des Apôtres, mais aussi s'inspirant des exemples païens de dévouement envers le bien commun; la grande "prière universelle" qui clôt la Lettre en apporte un témoignage.

On observera le loyalisme des chrétiens à l'égard du pouvoir impérial et de l'Etat, même persécuteur. Ignace d'Antioche fera de même, comme un grec de son temps. D'autres documents sont en affinité avec le judaïsme: la Didachè, par exemple, qui est un recueil d'une première législation chrétienne en matière de liturgie, de comportement moral et de discipline ecclésiastique, diffusé dans la Diaspora juive christianisée. La Lettre dite de Barnabé contient également des éléments judéo-chrétiens dans sa lecture de l'A.T. proche d'une lecture rabbinique.

Le Pasteur d'Hermas, qui appelle les chrétiens de Rome à une réforme morale, après le déclin de la ferveur première, révèle certaines affinités spirituelles avec les milieux juifs de la capitale italienne. Les écrits "Apocryphes" fleurissent aussi à cette époque; ils imitent les genres littéraires de l'A. et du N.T., véhiculant des courants marginaux voire sectaires. La jeune Eglise aura à relever trois principaux défis: la confrontation avec le judaïsme, avec l'hellénisme, et avec la Pseudo-Gnose; défis où s'illustreront, pour les relever, trois auteurs marquant du IIème s. : S. Ignace d'Antioche, S. Justin, et S. Irénée, qui tous trois porteront leur témoignage jusqu'au martyre. 
Extrait de la "Prière universelle" la plus ancienne ( placée vers la fin de la Lettre de Clément aux Corinthiens, et qui montre le loyalisme chrétien par rapport  aux responsables de la Cité terrestre.

 
(Seigneur)…" Rassasie les affamés, délivre nos prisonniers, relève les faibles, console les craintifs qui ont peur... Oui, Maître (Despota), fais luire sur nous ta face, pour le bien, dans la paix, pour nous protéger de ta Main puissante, pour nous libérer de tout péché, par ton Bras étendu, et nous délivrer de ceux qui nous haïssent injustement. Donne-nous la concorde et la paix ainsi qu'à tous les habitants de la terre, comme tu les as données à nos pères (les patriarches de l'A.T.) lorsqu'ils t'invoquaient saintement dans la foi et dans la vérité, afin que nous obéissions à ton Nom tout-puissant et excellent, et à nos chefs et à nos gouvernants sur la terre. C'est Toi, Maître (Despota), qui leur a donné le pouvoir de la royauté...afin que, reconnaissant que c'est par Toi que leur ont été données gloire et honneur, nous leur soyons soumis et ne nous opposions pas à ta volonté. Donne-leur, Seigneur (Kourié), la santé, la paix, la concorde, la stabilité, afin qu'ils exercent sans heurt la souveraineté que tu leur as confiée.

Car c'est toi, en effet, Maître céleste (Despota épouranié), Roi des siècles (Basileu tôn aiônôn), qui donnes aux fils des hommes la gloire et l'honneur et le pouvoir sur les choses de la terre. O Toi, Seigneur (Kourié), dirige leur conseil selon ce qui est bien et agréable à tes yeux, afin qu'en exerçant avec piété, dans la paix et la mansuétude, le pouvoir que tu leur as donné, ils te trouvent propice (favorable). O Toi qui seul peut accomplir ces bienfaits et de plus grands encore pour nous, nous te rendons grâces par le Grand Prêtre et protecteur de nos âmes, Jésus Christ, par qui soit à Toi la gloire et la grandeur, maintenant et de génération en génération et dans les s. des s. Amen" (Clém. Aux Cor. 60-61). 

 

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