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Le Paradis des innocents et leur chute

Dès le troisième jour, Dieu avait planté tout exprès pour l’homme un jardin de délices, nommé Paradis ou Eden. Ce jardin était orné de toutes sortes d’arbres, agréables à la vue et produisant des fruits délicieux. Au milieu se trouvaient deux arbres principaux : l’arbre de vie et l’arbre de la science du bien et du mal. Un fleuve qui se divisait en quatre bras, arrosait tout le jardin (On pense que le Paradis terrestre était situé non loin du golfe Persique, le long des rives du Tigre et de l’Euphrate. A certain endroit ces deux fleuves se rejoignent et se séparent de nouveau : ils forment ainsi le quatre bras dont parle la Bible. Quoi qu’il en soit, le déluge a dû complètement détruire et bouleverser ce lieu de délices, comme tous les autres points de la terre.)
Le Seigneur plaça l’homme dans ce lieu de délices, afin qu’il le cultivât et la gardât. En même temps, voulant mettre sa fidélité à l’épreuve, il lui fit ce commandement : « Mange de tous les fruits des arbres du Paradis ; mais ne mange pas du fruit de l’arbre de la science du bien et du mal ; car le jour où tu en mangeras, tu mourras. » Puis, il amena les animaux et les oiseaux du ciel devant Adam, qui imposa à chacun le nom qui lui convenait.
Adam et Eve, dans le Paradis terrestre, étaient dans un état parfait et pour le corps et pour l’âme. De plus, ils avaient reçu de la munificence  divine des dons infiniment précieux, qui devaient compléter leur bonheur sur la terre et leur donner toute facilité d’arriver au bonheur surnaturel du ciel. Ces dons étaient : la grâce sanctifiante qui les rendait les véritables enfants adoptifs de Dieu ; l’intégrité, la science, la droiture et la force de volonté qui anoblissaient les facultés de l’âme ; l’impassibilité et l’immortalité, qui devaient exempter leurs corps de toute souffrance et de la mort.
Adam et Eve jouissaient donc d’un bonheur ineffable dans le Paradis terrestre. Mais hélas, ce bonheur ne fut pas de longue durée.
Quand Dieu avait créé le ciel, au commencement, il ne l’avait pas créé vide et inhabité. Il l’avait peuplé d’esprits invisibles, appelés Anges, pour qu’ils fussent ses adorateurs et ses messagers dans le monde. Créés dans un état d’innocence et de sainteté, ils avaient eu, les premiers, à subir une épreuve avant d’être admis à jouir de la vue de Dieu et du bonheur éternel, qui leur étaient destinés.
Or, un grand nombre d’entre eux, excités par Lucifer, le plus beau de tous, s’étaient révoltés contre le Seigneur et avaient voulu devenir semblables à Lui. Il y avait eu un grand combat dans le ciel ente les bons et les mauvais anges ou démons : ceux-ci  avaient été vaincus et précipités dans les abîmes de l’enfer.
Lorsque Lucifer, devenu Satan, vit l’heureux état d’Adam et Eve dans le Paradis terrestre, il en fut jaloux et résolut de les perdre. C’est pourquoi il prit possession d’un corps de serpent, le plus rusé des animaux, se glissa près d’Eve et lui dit : « Dieu vous a-t-il défendu de manger du fruit de tous les arbres du Paradis ? » « Nous mangeons des fruits des arbres qui sont dans le Paradis, répondit la femme ; mais, pour ce qui est du fruit de cet arbre qui se trouve au milieu, Dieu nous a défendu d’y toucher et d’en manger, de peur que nous ne mourions. » Le serpent reprit : « Vous ne mourrez certainement pas ; mais Dieu sait que le jour où vous en mangerez, vos yeux seront ouverts et vous serez comme des dieux, sachant le bien et le mal. » En entendant ces paroles qui flattaient son orgueil, Eve considéra le fruit ; il lui parut qu’il était bon à manger ; elle en prit donc et en mangea ; puis, elle en présenta à son mari, qui par une lâche complaisance pour elle, en mangea aussi.
Dès l’instant, les yeux des deux coupables s’ouvrirent ; mais, hélas ! Ce ne fut que pour reconnaître le bien qu’ils avaient perdu et le mal qu’ils avaient commis, pour comprendre l’étendue de leur crime et rougir d’eux-mêmes. Pleins d’agitation et de trouble, ils voulurent fuir et coururent cacher leur honte dans les arbres du Paradis. Mais comment échapper aux regards de Celui qui est partout et qui voit tout ?
Qui peut dire la bonté de Dieu à l’égard de l’homme ? Après l’avoir formé avec un soin tout particulier, il met à sa disposition tout ce qui peut lui être utile ou agréable : les plantes et les fleurs, les oiseaux et les animaux ! L’homme est vraiment institué le roi de la création. Quelle reconnaissance ne doit-il pas témoigner chaque jour à son Créateur pour tant d’honneur et de bienfaits ? Et cependant qu’a fait notre premier père ? Dieu affirme : tu mourras ; Satan nie : Non, tu ne mourras pas ! Et c’est Satan qui est cru, qui est obéi, qui est préféré à Dieu ! Quelle odieuse révolte et quelle monstrueuse ingratitude ! Mais n’en faisons point de reproche à nos malheureux parents. Toutes les fois que nous fautons, ne faisons-nous pas comme eux !

 

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