Ruine de Sodome et Gomorrhe

Abraham accompagne ses trois visiteurs pendant quelque temps sur le chemin de Sodome. Le plus vénérable des trois, qui était le Seigneur, lui dit : « Les impuretés de Sodome et Gomorrhe ont dépassé la mesure : elles crient vengeance. »
Abraham fut effrayé en pensant à son neveu qui habitait Sodome, et, se rapprochant, il dit :

« Seigneur, ferez-vous partir le juste avec l’impie. S’il y avait cinquante justes dans Sodome, n’épargneriez-vous pas la ville à cause d’eux ? »

 « Oui, dit le Seigneur, pour ces cinquante justes, je ferais grâce à toute la ville » « Puisque j’ai commencé, dit Abraham, je parlerai encore à mon Seigneur, malgré mon indignité. S’il n’y avait que quarante-cinq justes, perdriez-vous toute la ville ? » « A cause de ces quarante-cinq justes, dit le Seigneur, j’épargnerais toute la ville. » Et Abraham, continuant ses supplications, en vint jusqu’à dire : « Que feriez-vous, ô mon Dieu, s’il n’y avait que dix justes dans cette ville ? » Et le Seigneur répondit : « Même pour dix justes, la ville serait sauvée. » A ces mots l’Éternel disparut et Abraham retourna dans ses tentes.

Mais hélas ! Les dix justes ne se trouvèrent point dans Sodome, et les deux anges du Seigneur, ayant continué leur route jusqu’à la ville, allèrent trouver Loth et lui dirent : « Hâte-toi de sortir de Sodome avec les tiens ; car le Seigneur va la détruire à cause de ses infamies. » Et il le forcèrent à fuir, la nuit même, avec sa femme et ses deux filles, en leur enjoignant de ne plus regarder en arrière.

Le soleil se levait à l’Orient quand Loth arriva à Ségor, bourgade du voisinage. Soudain le ciel se couvrit de noirs nuages ; la terre s’ouvrit et vomit des tourbillons de flammes, et une horrible pluie de feu, tombant du ciel à grands flots, s’unit au feu allumé dans les entrailles de la terre. Sodome, Gomorrhe, Adama et Séboïn furent consumées et détruites, et tous les habitants de cette terre maudite périrent par le feu. Un lac épais et sulfureux prit la place de ces fertiles campagnes ; un air mortel et empesté s’y fait sentir encore aujourd’hui : c’est la Mer Morte. Ainsi Dieu a fixé et maintient au milieu des hommes cette preuve terrible de la sévérité avec laquelle il punit les crimes de l’impureté.

Cependant la curiosité de la femme de Loth n’avait pu attendre que l’exécution des villes coupables fut achevée. Méconnaissant la défense de l’Ange du Seigneur, elle s’était retournée pour regarder en arrière ; aussitôt elle en fut punie, elle fut changée en statue de sel. Ce châtiment fait voir que Dieu punit toujours les désobéissants.

Que c’est beau et touchant, cet entretien de Dieu avec son serviteur Abraham ! Comme Dieu y révèle de bonté, sa miséricorde à l’égard des fautifs ! Oh ! Il ne demande pas mieux que de se laisser fléchir par la prière et de pardonner, et il descend pour cela jusqu’aux dernières limites de la condescendance. Mais alors, c’est tout : Si Dieu est la miséricorde même, il est aussi la souveraine justice. Et les fautifs abusant démesurément de sa patience, il les frappe, il les châtie. Or, nous venons de le voir, quand Dieu frappe, c’est terrible. N’abusons pas de la miséricorde de Dieu ; redoutons sa colère et songeons combien l’enfer éternel doit être épouvantable.